Bas les masques ! par Sylvaine Perret-Gentil
Dernière mise à jour : 3 mars 2021

C’est apparemment l’avis d’une partie de la population européenne et américaine qui s’est élevée contre le port du masque sanitaire en ces temps d’épidémie de coronavirus. Le masque mettrait donc une partie des humains mal à l’aise en ce début de 21e siècle. Contrainte aux effets physiques inconfortables, obligation liberticide et mesure inadaptée à la vie sociale, les motifs du refus sont dirigés contre les gouvernements, dont la politique sanitaire est jugée dictatoriale.
Pourtant ! Est-ce le bon ennemi à combattre ? Est-ce ce masque-là qu’il faut fustiger ?
Les masques font partie de l’histoire humaine. Il fut des époques, des sociétés et des contextes où l’usage du masque était courant, socialement admis, parfois indispensable, parfois imposé.
Bon nombre de civilisations ont connu les masques rituels, les masques mortuaires et les masques de combat. De l’Antiquité jusqu’au 18e siècle, on a utilisé les masques dans les arts du spectacle, le théâtre et la danse. Pour les festivités et les carnavals, les masques, grotesques ou de déguisement, ont eu la part belle. A Venise, au 18e siècle, la bauta servait en période de carnaval, mais pas seulement. Cet ensemble était utilisé le reste du temps pour sortir incognito. L’avantage était que l’on pouvait manger et boire sans enlever le masque, dont la forme particulière modifiait le son de la voix.
Le Moyen-Âge a connu les masques de la honte ou masques d’infamie. Il s’agissait de punir publiquement l’auteur d’un délit mineur en l’obligeant à porter un masque représentant une caricature de son délit. Les grandes épidémies de peste du Moyen-Âge ont vu apparaître le masque des « médecins », masque à bec qui contenait des herbes aromatiques ou du camphre pour se protéger, mais surtout lutter contre les odeurs putrides.
A l’époque romaine, on utilisait des masques de vessie animale dans les mines pour se protéger des vapeurs toxiques. Le tissu imbibé d’eau a été la principale protection de ceux qui travaillaient dans les marais insalubres. Puis la Révolution industrielle a étendu les besoins de protection pour certains corps de métiers. On appliquait sur le nez et la bouche une éponge humide ou un tissu serré en forme de cône, auquel on ajoutait parfois du vinaigre.
La Grande Guerre de 14-18 a fait naître les masques à gaz.
Le grand banditisme, avec ses hold-up célèbres, a aussi eu recours à divers moyens de camoufler les visages de ses acteurs, tels les bas-nylon, les cagoules ou les masques de déguisement.
Enfin, on n’oubliera pas les justiciers ou héros masqués qui ont marqué les générations comme Zorro ou Spiderman.
A l’exception du domaine médical et professionnel, les masques ont pratiquement disparu de nos théâtres et de nos vies. Quelques carnavals encore ou Halloween et Disneyland les rappellent à nos mémoires.
Mais avançons-nous pour autant démasqués ? Loin de là, car là où il n’y a pas de masques, il n’y a personne.