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Merci les enfants par Katia Elkaim



Cette semaine, au milieu du vacarme vaccinal, le souvenir de la shoah a eu un peu de mal à se faire entendre ; et pourtant, il y a un peu plus de 75 ans, aux côtés de vieillards et de femmes et d’hommes dans la force de l’âge, des enfants, des adolescents et des jeunes adultes étaient massacrés dans des camps de concentration, parce qu’ils étaient juifs. Il n’y a aujourd’hui, pas plus que hier de mots suffisamment puissants pour caractériser l’horreur à l’état pur.

De manière plus large, pensons aux privations subies par les enfants et les jeunes durant la première et la deuxième guerre mondiale, durant la guerre de cent ans, en Syrie en 2021, au Liban pendant des décennies, au sud-Soudan, dans les pays totalitaires et dans les treize pays qui non seulement connaissent la peine de mort pour un simple blasphème, mais encore exécutent des enfants pour cette infraction.


Et nous sommes au milieu d’une pandémie.


Au bout d’un an, nos jeunes n’en peuvent plus et sortent dans les rues. On parle de leur abattement.

Alors, bien sûr, lorsque l’on commémore les millions d’âmes gazées dans des camps et lorsqu’on prend connaissance du dernier massacre de jeunes filles quelque part dans ce bas-monde, on se demande si nos enfants ne sont pas un peu trop gâtés.


La réponse est non !


Bien sûr, qui peut comparer la peur d’être tué ou la faim qui tenaille avec l’ennui et la promiscuité ?

Personne ne compare, car la question n’est pas de comparer.

Il ne peut pas y avoir de classement. La peur de l’enfant battu est-elle plus ou moins intense que celle de l’enfant traqué pour son ethnie ?


Depuis plus d’une année, nos jeunes se plient de bonne grâce à toutes les exigences posées pour nous protéger nous, les adultes, leurs parents et grands-parents, ceux en qui ils ont placé leur confiance pour diriger parce que c’est ce que nous attendons d’eux.

Alors, pour nous éviter un risque fatal, parce qu’ils nous aiment, nous les vieux, ils apprennent des métiers par tutoriels, acceptent de ne pas sortir de leur chambre à coucher à journée faite, quand ils ont la chance d’en avoir une pour eux et, parce qu’ils nous respectent, essaient de ne pas trop braver l’interdiction des rassemblements alors que les restrictions aux libertés personnelles n’étaient parfois pas aussi dures au quotidien dans les pays communistes, dont on sait que les régimes n’ont tenu que quelques décennies.


Parce qu’ils nous honorent, ces jeunes, avec fatalité, se disent qu’ils seront les derniers vaccinés parce qu’ils sont ce qu’ils sont, jeunes !


Mais de plus en plus de pays parlent d’exiger un passeport vaccinal et à eux, nos enfants, qui font tant d’efforts, on leur répond : « Cet été, probablement que les plus vieux pourront se dorer la pilule au soleil, mais pas vous, car vous êtes jeunes. »


Alors, non, ils n’exagèrent pas quand ils descendent dans la rue pour dire leur mal être, ils exagèrent d’autant moins que nous leur faisons défaut de manière récurrente.


Et je ne parle pas du climat…


À l’ère du tout technologique, est-ce que nous leur enseignons suffisamment tous ces savoirs humains accumulés au cours des siècles, parce que le jour où un virus (informatique cette fois) mettra à mal notre planète, ou si tout simplement quelqu’un tire la prise, lequel d’entre eux saura comment fabriquer une planche ou poser un diagnostic?

Quant aux suites économiques de cette pandémie, c’est encore un legs pourri que nous leur faisons. En substance, nous leur disons : protégez-nous, patientez car vous n’êtes prioritaires sur rien car vous avez la vie devant vous et pendant qu’on y est, soyez gentils de nettoyer en sortant, puisque, vous avez la chance de sortir après nous.


La jeunesse, comme la culture ne semblent pas être des biens essentiels ou primordiaux et peut-être que c’est vrai en partie ; laissons-leur au moins le droit de se plaindre.


Alors non, ils n’exagèrent pas parce que nous non plus, les grandes personnes, nous ne vivons pas en temps de guerre, ni de famine, ni de grandes précarité dans nos contrées et qu’à l’aune de nos standards, nous ne pouvons exiger de nos enfants plus de résilience que nous ne nous en imposerions à nous-mêmes.


Si la vaccination est la seule issue, alors vaccinons sans lésiner, vaccinons jour et nuit et sans désemparer et disons à tous ceux qui s’interrogent : Votre enfant n’a pas hésité à vous protéger, il est grand temps que vous le soulagiez de cette tâche.


Photo by Jeffrey Czum

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